« Déplacer la maison, morceau par morceau… Attaché au ciel et au fleuve, ce paysage ne m'a jamais appartenu – de même, n'ai-je jamais appartenu au paysage… »
L. Novakova, Saint-Jean-Port-Joli, juin 2010
En démontant, puis déplaçant, morceau par morceau, les vestiges d'une maison incendiée vers l'espace d'exposition d'OBORO, Lenka Novakova reconstitue non seulement une architecture, mais un paysage en entier.
Cette maison noircie, découverte par l'artiste sur les berges du fleuve Saint-Laurent lors d'une résidence à Est-Nord-Est (Saint-Jean-Port-Joli), allait devenir, pour celle-ci, l'ancrage à partir duquel elle étudierait les phénomènes complexes et subtils qui se manifestent dans le ciel et les eaux. Pour envisager les marées, les nuages et les variations de la lumière, Lenka Novakova s'est donc postée dans une construction désolée, augmentant sa lecture du paysage des traces de mémoire humaine qui y subsistent.
Ce dialogue entre le fleuve, le ciel et la maison brûlée, patiemment documenté par l'artiste, se prolonge alors dans la galerie. De part et d'autre de l'architecture, à travers ses cadrages et ses interstices, sont projetées des vidéos du paysage d'origine. Comme un souvenir enveloppant la bâtisse, les eaux du fleuve continuent de s'avancer et de se retirer alors que la lumière se fait de plus en plus rougeoyante. En captant la dimension changeante des phénomènes naturels, à laquelle fait écho la nature incertaine et éphémère de l'être humain, il s'agit pour Lenka Novakova d'une quête de sens ainsi que d'une réflexion sur la temporalité et la mémoire.